Décallage Horaire

Conner Kent & Christopher Kent

Date et heure du topic : 28 Décembre 2014, Milieux de matinée
Lieu du topic : Smallville
Météo du Topic : Un orage d'hiver est à l'approche
Intervention d'un PNJ accepté ? Oui
But du topic : Des retrouvailles à sens unique

    Avoir pour couverture un poste de journaliste offrait une certaine marge de manœuvre pour justicier mes déplacements d'une ville à une autre. Si pour mon passage à Gotham City la semaine passée, j'avais utilisé le prétexte d'un article confrontant le Chevalier Noir à l'Archer Émeraude, aujourd'hui mon "alibi" pour venir à Smallville était un papier d'un tout autre type à écrire.

    Lorsque ma décision de remonter le temps fut prise, il m'avait été nécessaire de me renseigner sur l'époque, mais aussi, sur mes proches et leurs passés respectifs. Ne serait-ce pour les localiser et éviter les impairs qui pourraient me trahir. Quoi que de ce côté là, je ne doutais pas ne pas avoir besoin d'aide pour me louper. N'avais-je pas appelé Red Robin "Tonton" par réflexe ? Ne portais-je pas sur ma poitrine le symbole des El lorsque je sortais patrouiller ?

    Je savais donc mon frère de retour à Smallville et en période difficile. Dire que venir voir mon aîné, devenu aujourd'hui mon cadet - ne sentez-vous pas la migraine approcher ? - était ma lubie du jour s’avèrerait inexact. Je songeais à Conner, mais également à nos "parents" avant même de parler à Damian de mon projet. Avant même de remonter le temps. L'idée n'était pas forcément de l'approcher ou de lui parler, mais simplement de le voir, même de loin. D'autant qu'ici pour  lui je n'étais qu'un étranger qui allait devoir partir de 0 pour gagner sa confiance.

    Si jusque là j'avais sut m'abstenir de toute visite, même lointaine, je ne tenais plus. Je me privais dors et déjà d'aller à Métropolis sous peine d'être trop rapidement démasqué, je n'allais pas non plus me priver de l'une des raisons de ma venue dans le passé. C'était pour cette raison que lorsque mon rédacteur en chef a évoqué le besoin de remplacer sur le tard un journaliste chargé de faire une comparaison entre la reconstruction d'une ville de la taille de Star City, et celle d'une petite ville comme Smallville, j'avais répondu présent sous le regard éberlué de mes collègues qui pourtant savaient mon gout pour les Justiciers dans mes articles. Je prétextais que quelques jours au vert avant les réjouissances du jour de l'an, ne me ferait pas de mal. Personne ne s'opposa à ce que j'y aille. Personne n'avait envie d'aller dans ce "trou" perdu pour reprendre certains murmures. Pour ma part, pour y avoir connu quelques années ma grand-mère Martha Kent, y avoir passé des moments avec mon frère, mes parents et Tata "Grincheuse" (Kara), je n'y avais que de bons souvenirs.

    Si je nourrissais une certaine impatience de me rendre sur place et pourtant, j'appréhendais également d'y remettre les pieds. Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre ni ce que j'allais y trouver, ce que je savais en revanche, c'était tout ce que je n'y retrouverai pas. Je ne pouvais anticiper mon ressenti, mes réactions une fois à destination.

    Ce fut au petit matin qu'à moto, je quittait Star City pour rejoindre Smallville vers le milieux de la matinée. Il m'aurait été plus rapide d'user de mes pouvoirs pour me déplacer, mais j'avais apprit à apprécier me déplacer avec des moyens de locomotion ordinaires, et d'autres qui l'étaient bien moins. D'autant qu'ici, il était encore possible de respirer à plein poumons sans craindre la contamination. Autant en profiter ainsi que du paysage.

    On ignore la valeur de certaines choses que l'on pense acquises, jusqu'à ce qu'on les perde et c'est bien dommage...

    Je marquais un arrêt devant le chemin menant à la ferme Kent. Visière levée, le pied à terre devant la boite aux lettres blanche et bleue, j'observais la bâtisse de loin. Je me souvenais des courses pour venir jusqu'ici relever le courrier. Je pouvais presque me voir tantôt défiant mon père, tantôt mon frère, et parfois même ma tante acceptait de se prêter au jeu. Je nous revoyais dans la grange improviser des batailles, j'y écoutais souvent les histoires d'aventure de mes aînés. Que dis-je, écouter... Je buvais littéralement leurs récits. Je me souvenais de mon visage et de mes yeux ronds lorsque pour la première fois, je vis des animaux de ferme et que l'on me fit découvrir leur vie... Et comment oublier mon premier face à face avec Krypto...

- Papa, pourquoi la grosse vache on la trait pas làbas ?
- Tu as beaucoup à apprendre, fils...

    Je pouvais encore entendre les rires bienveillants dénué de moquerie comme si ma famille en cet instant se trouvait autour de moi à regardé le taureau pointé du doigt.

    Je soupirais, les doigts crispés sur les commandes. Et maintenant que je suis là, qu'est-ce que je fais ? Pour mon article, je n'avis qu'à consulter les archives du matériel que j'avais emporté avec moi pour connaître ce qui pour moi tenait de l'historique mais qui était aujourd'hui mon présent - alors ce mal de crâne ? - là n'était donc pas la question pour mon article. J'avais sous-estimé la charge émotionnelle qu'impliquait un retour sur les terres de ma Grand-Mère. Dire que je n'avais même pas encore aperçu mon frère ou la Maîtresse des lieux, ni même ma tante... Cela me confortait dans l'idée que je ne devais pas, dans l'immédiat, me rendre à Métropolis. Je réalisais seulement combien je n'étais pas prêt pour affronter mes parents. De toute façon si tu passes pour un gros nul, ni Mamy, ni Conner et encore moins ta Tante ne savent qui tu es ! Tu ne crèveras pas totalement de honte !

    Je n'étais pas censé connaître Smallville, je pouvais donc jouer la carte du journaliste citadin totalement perdu, remplaçant son collègue sur le tard sans grandes informations à la recherche d'une chambre ou d'un endroit qui me servirait de pied-à-terre durant mes investigations... D'autant que la météo se gâtait et que je n'allais pas tarder à me prendre un grain sur le coin du nez si j'en croyais les éclairs qui strillaient au loin le ciel et le souffle du vent encore lointain que mon ouïe percevait. Les tambours du tonnerre finirent par me convaincre.

    Après un soupire pour me donner du courage, je démarrai pour emprunter ce chemin que j'avais jadis si souvent foulé. Je me garai devant la ferme sans faire de vague et ôtai mon casque. Je n'en avais pas besoin, mais tout l'art du mime était dans le souci du détail inutile. Je ne risquais rien d'une tempête, mais tout humain normalement constitué ne souhaiterait pas l'affronter à moto. Un instant, je dû me reprendre pour ne pas laisser mon cœur s'emballer, ses pulsassions et un souffle trop rapide pourraient trahir bien des choses. Je passais rapidement ma main dans mes cheveux pour me redonner consistance et une fois prêt, je déposais mon casque sur ma scelle pour aller frapper à la porte. Faites qu'il n'y ait personne...

- ...

Oh quand même... Ça me casserait bien les pieds de me coltiner un article pareil pour rien...

     

 

Cela fait plus d'un an maintenant. Un an que cette foutue guerre a ravagé la moitié du pays, certaines villes étant plus touchées que d'autres, un an que le Syndicat de Justice et les Ravagers ne sont plus entrain de propager le chaos à travers la planète Terre. Ils en avaient fait des dégâts, et parfois sur le plan personnel, en s'attaquant à des proches des nombreux justiciers qui avaient tenté de se mettre en travers de leur chemin. De nombreuses personnes ont péri pendant ces affrontements, des personnes appartenant aux deux camps. Jay Garrick, le mentor des Teen Titans mais également de la défunte Young Justice. Cela avait été dur pour nous tous, et en particulier pour Bart, qui perdait là comme un membre de sa famille. La mort d'Ultraman avait été le coup de grâce pour les criminels venus du futur. Lex Luthor, désormais considéré comme un héros, était mort juste après avoir éliminé le leader de ce groupe venu pour se mesurer à ces justiciers dits de l' « Age d'Or », comme ils avaient coutume de le dire par moment. J'avais aussi perdu quelqu'un, ma petite amie, Tana, dans des affrontements, pendant une mission des Teen Titans. Les Ravagers, sorte de Titans version futuriste, avaient attaqué l'île de Hawaï, pensant que cela pourrait faire sortir des alliés pour mieux les prendre par surprise.

Cela n'avait pas raté, car nous avions pour la plupart été appelés pour y défendre ses habitants. J'avais prévenu Tana de ne pas couvrir l'événement, de peur qu'il lui arrive quelque chose. Mais son travail de journaliste était plus fort, et elle avait couru de nombreux risques. Je l'avais sauvé à une reprise pendant le combat, mais Superboy-Prime avait senti l'affaire. Il s'en était prit à elle et l'avait tué sous mes yeux, une rafale de thermo-vision la terrassant. J'avais vu rouge comme jamais auparavant, une haine m'envahissant, et furieuse envie de tuer avec. Je ne me doutais pas que cette envie pourrait me mener aussi loin. J'étais proche de réaliser ce méfait, de devenir comme ces personnes, mais Wonder-Girl et Red Robin étaient intervenus au bon moment. Sans eux, j'aurai eu un mort supplémentaire sur la conscience. Je pense tout les jours à cette journée qui a changé ma vie. C'est pour cette raison d'ailleurs que j'ai laissé tombé Superboy, et les Teen Titans avec. A quoi bon posséder des pouvoirs dépassant l'entendement si c'est pour ne pas arriver à sauver les personnes que l'on aime ?

Cette question, je me la posais tout le temps. J'avais laissé derrière moi les Titans pour me consacrer à une vie plus paisible, plus simple, en n'existant que pour être Conner Kent. En même temps, je n'avais laissé le choix à personne, en adressant un simple mot à mes anciens partenaires après les nombreux enterrements auxquels nous avions assisté. Je ne voulais plus de tout ça. Clark, Kara, Martha, Tim et les autres avaient bien tenté de me faire changer d'avis, mais mais décision était irrévocable. Pourtant, j'avais gardé ma tenue dans un tiroir, enfouie sous une tonne de vêtements. Une sorte de souvenir impérissable. Mon comlink du groupe de jeunes justiciers traînait également sur une commode, entre deux bouquins que j'utilisais pour mes cours. Il sonnait de temps en temps, quand certains membres tentaient de me contacter. Cependant, je ne répondais jamais, conscient que si jamais j'osais répondre, ça ne serait pas forcément pour dire que je revenais. Je préférais donc le laisser sonner, ou bien sortir de la pièce, le temps que l'alerte passe.

Depuis la tragique disparition de Tana, je m'étais rendu à Smallville, pour me ressourcer, ainsi que pour oublier toute cette histoire de justiciers, de combat contre la criminalité et tout le reste. Et puis mes pouvoirs servaient autrement ici. J'aidais Martha dans les tâches quotidiennes, et en échange, elle ne me disait rien sur mes éventuels envies de reprendre mon ancienne vie. On ne le s'était jamais dit, mais c'était un accord moral. Aujourd'hui n'allait pas déroger à la règle, mais pour le moment, ce n'était pas le cas. Non, je révisais tranquillement dans la grange, fermée pour l'occasion à cause du froid ambiant que l'hiver avait amené. Je bossais tranquillement sur mes devoirs de vacances dans un canapé, quand j'entendis un bruit de moteur se faire de plus en plus proche dans l'allée menant à la cours de la ferme. Je me demandais bien qui pouvait venir ici, d'autant que Martha était allée à Métropolis voir Clark. Cela ne pouvait pas donc être elle, ce qui voudrait dire qu'elle ne serait même pas partie de Smallville, elle ne serait pas partie bien longtemps. Je laissais donc mes occupations pour le moment afin d'aller voir qui voulait discuter.

A première vue, il avait l'air d'un inconnu perdu dans ce patelin qu'est Smallville. Une moto du genre baroudeur et la tenue qui allait avec. Je m'assurais d'avoir bien mes lunettes montées sur mon nez, avant de m'approcher quelque peu, mais tout en gardant une certaine distance.

« Si vous cherchez Martha Kent, elle n'est pas là. Elle ne reviendra pas avant la fin de la semaine. »

Je croisais les bras, attendant une réponse de la personne devant la porte de la maison.

 

    L'ouïe fine des kryptoniens me révéla bien vite que je n'étais pas venu pour rien. Quelqu'un se trouvait à l'intérieur de la grange derrière. Je ne bougeais pas cependant, un humain ordinaire ne saurait entendre ce que nous percevons. Une once d'adrénaline envahissait mon organisme, poussée par l'impatience mêlée à l'inquiétude du faux pas. Face à qui allais-je me retrouver ? Ma Grand-Mère Martha ? Peu probable. Je me souvenais de ses pas enjoués malgré le poids des années. Kara ? Ces pas n'étaient pas ceux de ma tante "Grincheuse", j'en étais certains, ils étaient bien trop masculins. Quoi que lorsque l'on écoutais parfois les paroles de Supergirl, on pouvait remettre en question sa féminité... Mon père ? Ce serait joué d'une sacré malchance que justement le jour où je me rendais à Smallville soit également celui qu'il avait choisi pour rendre visite à sa mère et Kon El. Il ne restait plus que mon frère. Un discret sourire étira furtivement le coin de mes lèvres. D'après ce que j'avais calculé, il devait avoir 20 ans et se trouver en pleine période de remise en question. Je ne l'avais jamais connus si jeune. Je n'entrerai dans sa vie que dans dix ans. Une seule et unique fois, à la mort de notre père, je l'avais vu réellement douter. Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre.

    La grange s'ouvrit enfin me faisant cette fois légitimement me tourner vers la grange et, comme je l'avais soupçonné, ce fut Conner qui apparu derrière. Je dû prendre sur moi pour ne pas montrer le choc de voir mon aîné plus jeune que moi... Que mon âge véritable... Il y a tout un monde entre savoir et voir de ses yeux, je venais d'en faire l'amer expérience.

    Les paroles neutres de Kon El finirent de me ramener sur terre : nous n'étions bien, à ses yeux, que des étrangers l'un pour l'autre. La désillusion de potentielles retrouvailles était cruelle. Un coup de poignard. Je réalisais douloureusement que rien n'aurait pu me préparer à cette difficile réalité. J'avais bel est bien perdu tout ceux qui m'étaient cher, rien ne pourrait les faire revenir et j'allais devoir commencer à apprendre à faire avec.

    Cette pensée renforça ma détermination. Le futur "moi" ne perdra pas sa famille comme j'avais perdu la mienne. Je comptais y veiller par dessus tout, quitte à ne finalement jamais exister. Le virus ne frapperait pas. J'ignorais quels seraient sur moi les effets d'un passé modifié, mais cela ne m'effrayait en rien.

    Un sourire plus franc apparut sur mon visage.

- Je ne viens pas rendre visite, je me suis perdu en cherchant à rejoindre Smallville. Du coup je cherche un abri avec ce qui arrive...

    Par dessus mon épaule, mon pouce désigna le mauvais temps au loin, à l'approche.

- Je comptais prendre une chambre en ville, mais je ne sais pas quelle direction prendre et je crains de pas avoir le temps de me mettre au sec.

    Je laissais un instant mon interlocuteur jauger par lui-même de la situation avant d'ajouter :

- Je ne vous demande ni une chambre, ni le gite, mais si vous avez un hangar pour ma moto et moi le temps que l'orage passe et si pour repartir vous pourriez m'indiquer la direction à prendre... Ce serait top.

    Autant profiter de la météo pour voir comment se portait réellement mon frère et ne pas me contenter d'une "bonne mine". Intérieurement, je souriais de le voir ses lunettes sur le nez. Je n'avais jamais voulu adopter cette astuce que je jugeais trop contraignante et avais toujours préférer me couvrir totalement le visage. Du moins, à l'époque où cela était nécessaire car les dernières années, avec les ravages du virus, il ne fut plus nécessaire à quiconque de taire son identité.